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La gamelle d'or

Dans la plus petite et la plus sombre des forêts, vivait seul le plus jeune et le plus pauvre des bûcherons. Il avait construit de ses propres mains la plus étroite et la plus délabrée des cabanes. A l’intérieur, on trouvait sa seule marque de richesse, une marmite en cuivre usée mais solide qu’il lui venait de ses parents défunts. Son activité consistait à ramasser à longueur de journée des bouts de bois qu’il liait sous forme de fagots pour essayer de les vendre sur le marché. Mais bien sur, peu de gens lui en achetaient et le jeune homme rentrait le soir avec moins de sous qu’il n’en fallait pour vivre. Ainsi ce pauvre homme passait sa petite vie dans la misère et le dénuement le plus total. Pour palier ce manque, il aimait se réchauffer le cœur en écoutant les oiseaux gazouiller et en s’octroyant des petites pauses près de la rivière pour écouter le doux ruissellement de l’eau. Un jour d’hiver, où le bûcheron n’avait vendu, sur le marché, que de quoi s’acheter quelques pommes de terres, il croisa sur le chemin une vielle dame qui semblait plus misérable que lui. Elle se découvrit la tête de sa capuche et lui demanda :

- Excusez-moi, jeune homme auriez-vous par la grâce du ciel quelques pièces pour que je puisse m’offrir un peu de pain ?

Le pauvre homme un peu désabusé que la vielle dame s’adresse à lui alors que de riches marchands passaient aux alentours lui répondit :

- Je suis désolé ma bonne dame, je rentre bredouille du marché et il ne me reste que quatre sous pour le reste de la semaine…

- Ce n’est point grave mon jeune ami, continue ta route et merci quand même ! Soupira la grand-mère résignée.

Le miséreux continua sa route mais se sentit coupable de ne pouvoir l’aider, au bout de quelques mètres une idée lui vint, il fit demi-tour et la rejoignit.

- Excusez-moi madame, je n’ai peut-être pas de quoi vous donner l’aumône mais si vous le souhaitez nous pourrions partager mon modeste repas qui se constitue de quelques pommes de terres achetées sur le marché.

- Soit ! Qu’il en soit ainsi et pour te remercier je devrais pouvoir en guise de dessert ramasser quelques fruits. Si mes jambes veulent bien encore me tenir debout !

Les deux compagnons commencèrent ainsi leur marche vers la cabane du bûcheron mais, un peu plus loin sur le bord de la route, un minuscule garçon les interpella :

- Oyez, oyez messieurs, dames

Je me présente, Jack Criket

Remplissez d’une pièce mon béret

Et de ma main sortira une flamme !

Les deux regardèrent le petit d’un air amusé et lui répondirent :

- Désolé mon pauvre garçon, si l’infortune fait partie de ton lot quotidien sache que nous sommes dans le même bateau, nous n’avons rien à t’offrir à part un minuscule repas chaud.

- D’accord, je me joint à vous

Je vais ouvrir l’œil et le bon

Pour ramasser quelques champignons

Afin d’agrémenter le tout !

Après cette petite phrase bien tournée, la petite troupe se remit à marcher vers leur destination en ayant meilleure mine qu’en partant. Avant d’arriver à l’entrée de la forêt, ils virent un homme robuste, la mine toute déconfite avec dans les mains un arc cassé. Le bûcheron s’approcha de lui et demanda :

- Qu’elle est donc la raison de votre désarroi ?

- Je viens de casser mon arc avant même d’avoir commencé à chasser, du coup, je n’ai pas de sous pour le remplacer ! Répondit le chasseur entrain de sangloter.

- J’ai par chance mon stock de bois invendu du marché je pense qu’on va pouvoir trouver une branche qui vous conviendra !

Le bûcheron déposa son tas de bois et laissa le chasseur chercher une branche appropriée pour son arc. Au bout de quelques minutes, il trouva ce qu’il lui fallait et, d’un geste montrant son expérience et sa maîtrise de la chasse, l’arc fut taillé et bandé.

- Je vous remercie infiniment mais que puis je faire pour vous en retour ?

Les trois se regardèrent le sourire aux lèvres et Jack répondit :

-Eh bien, part donc faire ton métier

Ramène un beau et gros lapin

Continue ce petit chemin

Et un bon repas nous pourrons partager.

- Qu’il en soit ainsi, à tout à l’heure !

Arrivé à la cabane chacun s’affaira à son petit travail, pendant que le chasseur essayait de débusquer un lapin, le bûcheron commençait à préparer ses pommes de terre, Jack partit ramasser des champignons et la vieille dame des baies. En fin d’après-midi, chacun revint avec ses petites provisions et s’attela à finir la préparation. Ils allumèrent le feu de bois et placèrent les ingrédients dans la marmite. Les quatre compagnons restèrent là un moment en regardant mijoter ce qu’ils avaient mis tant de temps à préparer. En cet instant, un coup de vent s’engouffra dans la cabane et attisa le feu, les quatre amis virent alors se former des lueurs dorés tout autour de la marmite. Le petit jack émerveillé par ce spectacle souffla dans un murmure :

- On dirait de l’or !

La vieille dame avait les yeux humides, ceux du bûcheron pétillaient et le chasseur ravala un sanglot. Alors, un sentiment de plénitude embauma la pièce et une chaleur tout autre que celle du bois leur réchauffa le cœur. Au bout d’une heure, tout était prêt et nos quatre amis commencèrent à manger. A la fin du repas, la vieille dame s’adressa à Jack :

- Eh bien si tu nous montrais enfin ce fameux tour de magie ?

- Je connais certains tours mais pas de magie

Car en échange de quelques sous

Je remets mon béret et je ris

En prenant mes jambes à mon cou !

Tous rigolèrent ainsi de vive voix à l’espièglerie du petit Jack. Et il finir la soirée en pensant qu’un repas leur fut rarement aussi bon tant par les victuailles que par la magie qui siégeait en ces lieux.

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